Qu’est-ce que les maladies Charcot-Marie-Tooth ?
Les CMT sont des maladies génétiques héréditaires, neuromusculaires, évolutives, qui n’entament pas l’espérance de vie. Elles atteignent les nerfs périphériques provoquant souvent une amyotrophie des mollets, des avant-bras et des mains.
Les CMT offrent une grande hétérogénéité génétique c’est-à-dire que, sous un même nom, on trouve des maladies dues à des gènes différents, situés sur des chromosomes différents, mais le tableau clinique reste sensiblement le même.
Il y a plusieurs formes de CMT qui se différencient par leur mode de transmission, leur localisation génétique, la partie du nerf affectée :
- Les CMT de type 1 (type démyélinisant) présentent une vitesse de conduction nerveuse ralentie car la gaine de myéline qui entoure le nerf ne fonctionne pas correctement.
- Les CMT de type 2 (type axonal) ont des vitesses de conduction nerveuse normales car le problème réside dans l’axone et non dans la gaine de myéline.
- Les CMT liées à l’X ont une myéline anormale et des vitesses de conduction légèrement ralenties. De plus le CMT-X ne se transmet pas de la même manière que les CMT-1 ou CMT-2.
Chacun de ces types est ensuite subdivisé en sous-types (1A, 1B…, 2A, 2B…) en fonction de la cause génétique.
Une autre maladie proche de la CMT est appelée Tomacula ou Neuropathie Héréditaire avec Hypersensibilité à la Pression. Après compression d’un nerf, ces malades développent une neuropathie qui peut durer plusieurs mois. La récupération est, ensuite, très souvent complète.
Comment diagnostiquer une Charcot Marie Tooth ?
Le diagnostic est fait à l’aide de l’électromyogramme (EMG), d’une analyse génétique à partir d’une prise de sang (pour les formes de la maladie dont le gène est connu) et parfois à l’aide d’une biopsie nerveuse.
L’électromyogramme permet de distinguer les atteintes de la gaine de myéline* avec diminution des vitesses de conduction motrice (souvent moins de 30 m/sec sur le nerf médian) de la dégénérescence axonale avec des vitesses de conduction motrice sensiblement normales.
Ces examens aident à déterminer de quel type et de quel sous-type de CMT est atteint chaque patient.
Comment une Charcot Marie Tooth se transmet-elle ?
Les CMT sont dues à une anomalie génétique transmise par un au moins des parents.
Dans les formes à transmission dominante, l’un des parents est lui-même malade, parfois sans signes cliniques : chacun de ses enfants, quel que soit le sexe, a un risque sur deux d’hériter de l’anomalie.
Pour les formes à transmission récessive, il faut que les deux parents, eux-mêmes porteurs sains, soient porteurs de l’anomalie génétique. Leurs enfants auront 25% de chance d’être indemnes, 50% de risque d’être porteurs sains et 25% de risque de développer la maladie.
Ceux qui seront porteurs sains de même que ceux qui seront malades peuvent transmettre l’anomalie génétique mais ont très peu de risque d’avoir à leur tour des enfants malades : ce n’est possible que si leur conjoint est également porteur de l’anomalie.
Dans les formes assez fréquentes de CMT liée à l’X, la transmission sera variable selon le sexe du parent atteint et de l’enfant : une mère CMT aura un risque sur deux de transmettre la maladie à chacun de ses enfants, quel que soit le sexe, tandis qu’un père CMT transmettra le gène défectueux à ses filles uniquement.
Comment se manifestent-elles ?
L’âge d’apparition des symptômes est très variable, le plus souvent dans l’enfance ou chez l’adulte jeune. La forme précoce et sévère de CMT a été appelée « maladie de Déjerine-Sottas ».
Formes sporadiques : il faut signaler aussi quelques cas de mutation génétique spontanée, sans manifestation de la maladie connue dans la famille, ainsi que des cas où la transmission héréditaire est difficile à discerner, faute de renseignements sur la famille.
Les premiers signes : ils concernent généralement les pieds qui se creusent, deviennent insensibles et peu stables. Peu à peu un steppage s’installe provoquant des chutes, des entorses, une difficulté à courir, le périmètre de marche se rétrécit, les rétractions tendineuses peuvent provoquer la mise en « griffe » des orteils, l’amyotrophie donne un aspect caractéristique « en mollet de coq ».
L’atteinte des mains n’est pas systématique et apparaît généralement après plusieurs années d’évolution : les mouvements fins sont difficiles à exécuter, les doigts peuvent se mettre en « griffe », l’amyotrophie peut provoquer la perte de la fonction « de pince », une diminution de force. En principe toutes ces atteintes sont bilatérales…
Les crampes sont fréquentes surtout en période d’évolution.
Les déformations et l’amyotrophie sont variables, par contre la fatigue (voir article AFM), l’équilibre instable, la station debout pénible, la montée d’escaliers difficile et l’habileté manuelle fortement diminuée sont constants.
Comment évoluent-elle ?
Les CMT évoluent en général lentement, mais parfois, par poussées, en particulier à l’adolescence, quelquefois lors d’une grossesse, de la ménopause ou d’une situation de stress.
Chaque cas est particulier.
La gravité de l’atteinte est variable d’un patient à l’autre y compris dans une même famille, et rien ne permet de prédire l’évolution. Le degré de handicap peut aller d’une simple gêne à la marche, jusqu’à l’usage d’un fauteuil roulant (peu fréquent : environ 10% des cas).
La longévité n’est pas affectée.
Quels accompagnements peut-on proposer ?
Il n’existe actuellement aucun traitement curatif. En revanche, il est très important de prendre des mesures préventives.
- La kinésithérapie est essentielle pour retarder la survenue de déformations importantes et l’amyotrophie, et conserver un état orthopédique optimal en attendant les futurs traitements. La rééducation doit être douce, le plus souvent passive (mobilisation des articulations, massages…), la pratique de certaines postures est souhaitable. En revanche, il ne faut jamais forcer, faire de la musculation intensive, car un muscle fatigué se détériore plus vite. II faut toujours tenir compte de la fatigabilité aussi bien pendant la rééducation, qu’au travail ou dans la vie quotidienne.
- L’usage d’une canne, le port d’attelles, de chaussures orthopédiques (l’esthétique a beaucoup évolué !) permet de retrouver une certaine stabilité, diminue le risque de chutes et prolonge la marche.
- La chirurgie orthopédique peut apporter un soulagement et un maintien de la marche, mais n’arrête pas l’évolution de la maladie. Diverses interventions sont possibles selon l’âge du malade et son état orthopédique. La chirurgie de la main peut restaurer la fonction de pince. Il est important de consulter une équipe pluridisciplinaire qui connaît bien la maladie et son évolution.
- Diverses aides techniques peuvent être envisagées : petits objets adaptés pour boutonner, tourner une clé, tenir un stylo, dévisser des bouchons… L’utilisation d’un ordinateur redonne de l’autonomie, notamment aux étudiants. L’usage d’un fauteuil roulant manuel ou électrique de façon continuelle ou en appoint redonne une autonomie de déplacement. Le choix d’une voiture à boite de vitesse automatique recule le moment de recourir aux équipements de conduite assistée.
Vivre avec une Charcot Marie Tooth
- Le handicap est variable et permet généralement une vie sensiblement « normale ». Le choix du métier est essentiel afin de tenir compte de l’évolution possible : il vaut mieux éviter un travail demandant une station debout prolongée ou de nombreux déplacements, ou bien, demandant une grande dextérité manuelle, car il y a de fortes probabilités d’être un jour dans l’obligation d’arrêter ces activités. Le choix du lieu de résidence est lui aussi important : éviter les maisons avec escaliers…
- La compréhension de l’entourage est essentielle dans l’acceptation de la maladie, en particulier chez les enfants. Un enfant peut pratiquer un sport à condition que l’éducateur soit conscient de ses limites et qu’il l’intègre à un poste compatible avec son handicap (gardien de but au foot, chronométreur lors d’une course par exemple). Pour leur développement, les enfants ont besoin, dans la mesure du possible, de faire les mêmes activités que leurs camarades, ils admettent difficilement d’être mis à part, mais acceptent des compromis s’ils peuvent participer.
- L’évolution lente de la maladie permet de s’adapter progressivement à la baisse des performances, mais provoque des interrogations pour l’avenir. Les signes cliniques peu visibles au début, la fatigabilité variable d’un moment à l’autre, doivent être attentivement pris en compte par l’entourage.
- Un soutien psychologique peut s’avérer utile. Car malgré tout, nombreuses sont les personnes qui parviennent à mener une vie riche et épanouie, en refusant d’hypothéquer le présent en fonction de l’avenir.
- Rencontrer d’autres personnes concernées afin de rompre l’isolement, d’échanger des « trucs ».
- Ne pas hésiter à accepter des aides techniques.
- Ne pas négliger la prise en charge kinésithérapique.